L’objectif de cet article est de répondre à cette question : Qu’est-ce que le fantastique ?
Le Petit Robert propose une définition assez simple de l’adjectif fantastique : « Qui est créé par l’imagination, qui n’existe pas dans la réalité .»1
Pierre-Georges Castex, un historien français du XXe siècle, dans son livre Le conte fantastique en France de Nodier à Maupassant (1951) affirme que le fantastique se caractérise « par une intrusion brutale du mystère dans le cadre de la vie réelle »2. Autrement dit, dans un récit fantastique, un jour un fait inexplicable survient dans la vie quotidienne, réelle du personnage principal. Donc selon Castex, l’élément clé du récit fantastique est le surgissement d’un fait inexplicable, dans le monde banal de protagoniste.
Tzvetan Todorov: le fantastique égale l’hésitation
Pour un autre historien français Tzvetan Todorov, le fantastique égale l’hésitation, étant donné qu’il définit le fantastique du XIXe siècle, dans son livre, Introduction à la littérature fantastique (1970), ainsi :
« Le fantastique, c’est l’hésitation éprouvée par un être qui ne connait que les lois naturelles face à un évènement en apparence surnaturel. »3
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D’après Todorov, pour que le fantastique existe dans un récit, il faut qu’un événement étrange se déroule, et il y a deux manières d’expliquer cet événement, on accepte soit une explication naturelle, soit une explication surnaturelle. Une explication naturelle, c’est accepter que le personnage ait rêvé ou ait imaginé l’événement étrange. L’explication surnaturelle, c’est que l’événement étrange s’est vraiment déroulé et que ce que le personnage a vu, c’est vrai. L’hésitation entre les deux explications, de la part de protagoniste et de lecteur, cela crée le fantastique. Donc l’hésitation est un élément central du récit fantastique, tout comme dans les deux récits fantastiques : Le Horla et La Vénus d’Ille.
Les nouvelles fantastiques : Le Horla et La Vénus d’Ille
La nouvelle Le Horla (1887) de Guy de Maupassant, nous présente un monde banal de personnage principal, de narrateur. Le narrateur dans cette nouvelle sent la présence d’un être invisible qu’il nomme le « Horla » chez lui. L’élément fantastique vient de l’incertitude de la part de protagoniste (le narrateur) et avec lui de lecteur. Les deux (le narrateur et le lecteur) hésitent entre les deux interprétations de ce fait étrange (la présence d’un être invisible chez le narrateur), une naturelle et l’autre surnaturelle. L’explication naturelle, c’est que le narrateur est dérangé et il a ainsi imaginé la présence d’un être invisible. L’explication surnaturel, c’est que l’être invisible existe et vit chez le narrateur. L’élément clé de l’hésitation rend cette nouvelle un récit fantastique.
De même, la nouvelle La Vénus d’Ille (1837) de Prosper Mérimée raconte des faits étranges tels que : le retour de la pierre jetée par le jeune homme, le doigt replié sur la bague, les bruits de pas dans l’escalier, les marques de l’étreinte, la bague découverte au pied du lit dans la chambre à coucher. Ces évènements étranges poussent le narrateur et le lecteur à accepter une explication surnaturelle qu’un objet, la statue de la Vénus s’est animée et a tué le marié.
L’aspect fantastique dans cette nouvelle vient du doute, de l’incertitude qui reste jusqu’à la fin du récit. Même après la fin de l’histoire on n’est jamais sûr de ce qui s’est passé, si la statue de Vénus a tué le marié ou pas.
L’étrange et le merveilleux
Donc l’hésitation entre les deux explications, cela crée le fantastique, mais dès qu’on accepte une ou l’autre explication, nous quittons le fantastique, d’après Todorov et nous entrons un genre voisin du fantastique (l’étrange ou le merveilleux).
Selon Todorov l’étrange et le merveilleux sont des deux genres voisins du fantastique où le surnaturel existe aussi, et le fantastique se trouve entre ces deux genres.
Ainsi nous pouvons résumer ainsi que: le mot ‘fantastique’ comprend tout ce qui est irréel, mystérieux, étrange. Le récit fantastique se caractérise par l’apparition des événements étranges, par l’intrusion du surnaturel dans le monde familier de protagoniste.
Récapitulons en énumérant les caractéristiques du fantastique :
Les caractéristiques du fantastique
- La représentation du monde banal de protagoniste.
- Le surgissement d’un événement étrange dans l’univers quotidien de protagoniste.
- L’événement surnaturel choque le personnage principal.
- L’événement bizarre provoque également la peur chez le protagoniste du récit.
- L’élément central dans un récit fantastique : l’hésitation de la part de protagoniste et du lecteur, à la suite d’un fait étrange.
- Le fantastique se distingue de ses deux genres voisins de l’étrange et du merveilleux
Avez-vous lu ? Voici quelques classiques du genre fantastique :
- Le Horla (1887) de Guy de Maupassant
- La Vénus d’Ille (1837) de Prosper Mérimée
- La ruelle ténébreuse (1932) de Jean Ray
- La cafetière (1831) de Théophile Gautier
- Le cauchemar d’Innsmouth (1936) de Howard Philips Lovecraft
- Le Tour d’écrou (1898) d’Henry James
Notes
- REY Alain et REY-DEBOVE Josette, Le Petit Robert, Paris, Dictionnaires Le Robert, 1986, p.758.
- CASTEX Pierre-Georges, Le Conte fantastique en France De Nodier à Maupassant, Paris, Librairie José Corti, 1951, p.8.
- TZVETAN Todorov, Introduction à la littérature fantastique, Paris, Éditions du Seuil, 1970, p. 29.
By Anchal / Last updated: November 29, 2023
Voir aussi : La différence entre le fantastique et le merveilleux